Après être sortie de la clinique Villa Montsouris, je me suis dit que les anxiolytiques avaient réponse à tout. Je prenais des quantités démesurées pour ne plus penser, pour ne plus criser. Apparemment j’aurais pu mourir, mais bizaremment ça ne me fait ni chaud ni froid de savoir que j’aurais pu y laisser ma peau.
Je ne veux plus manger. Voir le chiffre dégringoler est plus important que manger, maigrir à tout prix et tant pis si je suis faible, si j’ai la tête qui tourne à chaque fois que je me lève. J’ai même plus faim, juste mal au ventre en permanence. Je suis fatiguée de me battre, je vais juste me laisser dépérir mais ça prends du temps, trop de temps à mon goût. Oui, je veux être maigre à en faire peur, éloigner tout le monde de moi, devenir un cadavre inexistant déambulant. Un cadavre qui ne ressentira plus rien, trop fatiguée pour penser à quoique ce soit. Je suis fatiguée d’être un fardeau pour tout monde, je veux disparaître. J’ai raté médecine. Je m’étais promis de mourir si je ratais médecine. Je crois qu’on y est à ma fin. Pensez-vous qu’en 6 jours sans manger je meurs ? Je l’espère en tout cas. Je peux plus manger, mais regarder les autres manger ça me dérange pas, c’est comme si j’avalais tout pareil qu’eux, comme si je prenais mon repas mais sans les calories, voilà pourquoi je me donne la peine de descendre au self, voir ces gens s’empiffrer de cette nourriture grasse. Ils deviendront gros et moi squelettique, ils ingèrent les calories que je n’ingère pas et ça c’est réjouissant. Je veux maigrir ou mourir, je sais pas, peut-être l’un peut-être l’autre ou peut-être les deux.
Je ne veux pas retourner à Laennec, cette unité de malades mentaux et physiques. Ils veulent me sonder, mais me sonder pour quoi ? Je suis si grosse j’ai tellement de réserve.
Ils ne m’ont pas sondée et tant mieux, ils veulent juste regarder ce que je mange, mais je cache la nourriture pour qu’ils pensent que j’ai mangé.
Hier soir je me suis enfuie par la fenêtre parce que mon corps dénutri passait entre les barreaux.