Je me sens seule avec mon désespoir. Je suis sur un chemin boueux, et à chaque pas je m’enfonce ou risque de m’enfoncer. Il m’entraîne vers ma mort, le long d’un long chemin et au bout ma tombe. La porte est derrière moi mais aucun moyen de se retourner et les clés sont sur ma tombe. Les clés de quoi, je ne sais pas, celle de la liberté via la mort, via le retour à la vie. Je ne sais pas à quoi correspondent ces clés. Peut-être est ce un monde pire que celui dans lequel je vis. Le noir, le désespoir et la tristesse. Pourquoi dans père et pire il n’y a qu’une lettre qui change, et pourquoi dans mer et mère les mots sont pareilles ? J’ai le sentiment de me noyer et c’est le pire. Je ne sais pas si mon corps se vide d’air ou se remplit d’eau, mais cela m’empêche de manger parce qu’il n’y a plus de place. Plus de place pour la vie, pour l’essence du corps humain. La machine ne marche plus, pourquoi mettre t-on de l’essence dans une voiture qui ne fonctionne pas. Qu’est ce qui ne va pas chez moi ? Je ressens tout et rien. Et sincèrement je préfère ne rien ressentir, que le froid d’un corps squelettique, dormir jusqu’à l’infini. Paisiblement je suis triste. Je suis sans cesse à regarder en arrière lorsque j’étais maigre, je me plaisais à entendre dire des autres à quel point j’étais mince, flotter dans mes fringues. Ne plus avoir de forme, être un cadavre ambulant qui gérait tout, qui était bonne à l’école, gentille, une autre moi. Et il me doit de la retrouver sur le chemin. Je préfère mourir maigre plutôt que de continuer à grossir encore et encore. Je n’ai plus d’appétit, rien ne me donne envie, je n’ai envie de rien, faire à part regarder le malheur des autres dans des séries stupides dramatiques pour oublier que moi aussi je souffre. Et malgré ça je mets sur pause et je contemple ma propre misérable vie. Je suis morte en 2015, pas la peine d’essayer de me réanimer.